Bâle, le 22 avril 60 Mon cher Victor, tout part finalement d’un jeu de cartes postales illustrées (10-4-1960) où, à ma question « quel est mon cauchemar » la réponse fut une vue de Bâle représentant une place perchée en haut d’une colline, au cœur même de cette ville où Paracelse enseigna vers 1528 et dont l’université fête cette année 500 ans d’existence. Nous sommes à la veille d’un combat imminent, l’événement métaphysique le plus important de ma vie sinon de la vie tout court, approche. Je crois être assez armé (le double matériel de la Clef me dut remis le soir de mon arrivé à Bâle) ou du moins autant qu’on puisse l’être dans une confrontation si inégale lorsqu’on l’envisage de puissance à puissance et non pas de désert à désert comme elle devrait être. A partir de ce moment, on n’aura plus de mes nouvelles, du moins écrite. Le temps qui me sépare encore de l’heure décisive, je le conserve à la toilette de mes reflexes ( ?), plongé jusqu’au cou dans la baignoire de mon verbe. Ton ami Gherasim Luca